Jeudi dernier après-midi, juste avant la tombée de la nuit, un cortège d’une trentaine de véhicules portant les drapeaux du Québec et du Canada à l’envers, s’est présenté devant la résidence de l’ancien chef du gouvernement Legault assiégé. “C’était ce putain de Legault, ce putain de Lefebvre, et la liberté, la liberté !” Puis on a pris le temps de s’arrêter devant chez moi et c’est là que toute la frustration a pris le dessus », raconte Éric Lefebvre en entrevue avec notre Bureau de recherche. M. Lefebvre était à la maison avec sa femme et sa fiancée de 16 ans. Dans deux vidéos de moins d’une minute diffusées par notre Bureau d’enquêtes, des véhicules roulent lentement devant la maison de M. Lefebvre, klaxonnant constamment et criant des non-dits à l’emplacement du candidat de la CAQ. Bien que la majorité des voix soient étouffées par le son des klaxons, un conducteur de SUV pointe en direction du membre du Congrès sortant en criant : “Qu’est-ce que c’est ?” tonnerre. “Quand on fait de la politique, on se donne corps et âme pour notre population. On sacrifie beaucoup de temps avec nos familles et avec nos amis et le seul petit endroit où on peut se réfugier c’est notre résidence et là j’ai vraiment l’impression que mon intimité a été violée”, déplore-t-il. La scène a été filmée en partie par l’ancien conseiller de Victoriaville. On y voit sa femme se précipiter dans la rue pour filmer les signes de visiteurs inattendus. “Assurez-vous qu’ils ne vous voient pas”, dit son mari pour la protéger. Le couple porte plainte à la SQ. Depuis le début de l’année, 221 cas de menaces contre des personnalités politiques ont été signalés. Selon nos sources, il y a eu une forte augmentation depuis l’annonce des élections. “Tu voleras mon jugement” Les événements de jeudi dernier sont le point de basculement d’une campagne caractérisée par des menaces dans cette circonscription du Centre-du-Québec, affirme Éric Lefebvre. Le 31 août, un véhicule aurait tenté de faire sortir la voiture conduite par le chauffeur du politicien de la route sur l’avenue Jutras à Victoria. Il voyage dans un SUV peint aux couleurs de l’establishment politique. Le 3 septembre, M. Lefebvre aurait trouvé une de ses affiches de campagne vandalisée le long du même boulevard. Il portait l’inscription “Liberté” et la croix gammée, la croix gammée, symbole de l’idéologie nazie. Le 4 septembre, lors du festival du bœuf d’Inverness, un groupe d’hommes aurait suggéré au député d’écrire son nom sur une piñata pour qu’il puisse la frapper. “Tu vas me voler mon coeur”, a dit l’un d’eux. Ce même soir au spectacle des Cowboys Fringuant au stationnement Bigarré de Victoriaville, un homme aurait accosté l’élu avec des propos menaçants. Éric Lefebvre, qui brigue un troisième mandat, regrette les conséquences de ces actes d’intimidation sur sa fiancée, le soir de la visite inopinée du cortège. L’adolescent a une déficience intellectuelle modérée. «Pendant quatre ans, elle avait fait peu de progrès… maintenant, elle pouvait prendre un taxi (toute seule). Il sera difficile de savoir combien de pas en arrière nous prendrons à cause de ce fait. Déjà, le lendemain, il ne voulait même plus sortir de la maison… Quand une voiture est passée devant la maison, il m’a dit : Eric, ils reviennent ?’ dit le candidat avec une boule dans la gorge avec émotion. Dans une vidéo fournie par M. Lefebvre, qui ne sera pas diffusée, on voit la jeune fille de 16 ans en proie à une véritable crise de panique dans les bras de sa mère alors qu’elle tente de la calmer. Le député, également chargé de cours dans les écoles de sa région, refuse de blâmer ses adversaires politiques pour cette série d’événements menaçants. « Souvent, ce que nous disons aux jeunes, c’est de réfléchir aux conséquences de vos actes. Alors, aujourd’hui, je demande aux adultes”, conclut-il. Notre Bureau de recherche a demandé aux cinq principaux partis de savoir combien de leurs candidats avaient subi des menaces similaires ? Le Parti conservateur du Québec affirme que deux de ses militants ont été victimes d’attaques au couteau et que certains de ses candidats ont été intimidés. Le Parti Québécois ne désapprouve que certaines affiches vandalisées. Solidarité du Québec et le Parti libéral du Québec n’ont pas répondu à nos demandes.