Il y a des socialistes heureux. “Qui pouvait compter il y a trois mois que le PS aurait un groupe à l’Assemblée, qui pèse les orientations du Nupes, qui exprime ses accords, ses désaccords…” se félicitait le député Jérome Guedj, fin août, dans Blois. Le début de cette 16e législature “a permis de montrer à ceux qui pensaient que le Nupes était une alliance de circonstances qu’il y avait plutôt une fenêtre pour construire quelque chose dans le temps”, a ensuite ajouté le député du Calvandos Arthur Dorr. Mais l’enthousiasme est loin d’être universel chez les enfants de Jaurès. Depuis la fin de l’été, d’autres voix, moins optimistes, se sont élevées. Et plus précisément celle de Bernard Cazeneuve qui ne digère pas l’approche de son ancien parti face à la France insurgée. Début septembre, il a donc décidé de procéder en publiant un manifeste signé par 400 personnalités opposées à cette alliance. On y retrouve le maire du Mans, Stéphane Le Foll, l’ancien premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis, l’actuelle leader de la minorité Hélène Geoffroy, le maire de Vaulx-en-Velin (Rhône) ou encore le président de la Région Occitanie. , Carole Delga. “Ce serait une erreur de se contenter d’attitudes grandioses de désobéissance, acceptant le mariage de l’inconséquence et de la violence, dans un nihilisme où la colère empêcherait l’arrivée de l’espoir”, écrit l’ancien premier ministre dans ce manifeste, ajoutant : “laissé en que nous croyons être imprégnés de l’esprit de la teinte.” Et Bernard Cazeneuve d’accompagner son manifeste d’une interview piquante où il laisse échapper que “l’administration PS s’est laissée chouchouter” par Jean-Luc Mélenchon. Dans le même temps, Carole Delga a également pris ses distances avec la démarche d’Olivier Faure. La tribune de Cazeneuve “Je l’ai signée car je partage 90% de ce qu’il a écrit, chaque contribution est importante dans une réflexion globale”, assure La Dépêche du Midi. Mais une approche complètement différente est nécessaire. “Il faut savoir se mettre ensemble pour donner des réponses aux Français”, nous confie-t-il, ajoutant : “C’est ce que j’ai dit à Olivier Faure. Maintenant, nous devons travailler. » En effet, pour l’ancien ministre, la participation de l’intergroupe Nupes à l’Assemblée nationale n’est pas un obstacle : « Le groupe PS n’a pas voté la même chose que LFI sur plusieurs lois importantes, ce qui m’a rassuré. Leur position ne contredit pas les valeurs socialistes.” Mais surtout, le président de région est pleinement conscient de l’urgence : “En étant sur le terrain, je vois que le moral des Français est au plus bas. On voit aussi que l’entrée du RN à l’Assemblée a été réussie en termes d’image. Ils sont devenus des cahiers, ont montré du sérieux. Il est urgent d’agir pour enrayer la spirale du désespoir qui mène au populisme.” Pour ce faire, Carole Delga organise, le 25 septembre, à Bram dans l’Aude, les Etats stratégiques de la gauche : « C’est une démonstration que la gauche fonctionne, qu’elle sait rassembler et attirer les gens. Il y aura de nombreuses personnes issues de la société civile, du monde de l’éducation ou de la santé. Celle-ci sera développée dans d’autres territoires français. A ce jour, il y a déjà près de 600 inscrits dont 20% hors Occitanie”, précise-t-il, ajoutant : “Il faut travailler au sein du PS mais aussi avec d’autres partis de gauche, avec la société civile. , penseurs, chercheurs… Les mois à venir peuvent être très émouvants, il faudrait faire preuve d’humilité pour se projeter aux Européens aujourd’hui n’a pas vraiment de sens. » François Hollande, qui a publié cette semaine un livre “Troubles”, a fait, comme à son habitude, une sorte de synthèse entre ces deux positions. “La plateforme de Bernard Cazeneuve est très bonne mais, au-delà du nombre impressionnant de signataires, c’est à eux de fixer un calendrier. L’une des étapes sera le congrès du PS”, a expliqué cette semaine l’ancien président de la République à La Dépêche. Pour l’ancien occupant de l’Elysée, l’avenir passe toujours par le Parti socialiste, mais seulement s’il s’éloigne de la France Insoumise. “Le PS pouvait espérer que l’électorat parti pour Renaissance reviendrait, mais s’il se concentre sur Nupes, il ne pourra pas y parvenir”, déplore-t-il. Et de conclure : “Si le PS d’aujourd’hui décidait de fusionner avec LFI notamment à l’occasion des élections européennes, beaucoup décideraient de construire autre chose. J’ai cette constance de croire aux partis politiques.” Si ce n’est pas une menace, ça y ressemble.